lundi 7 décembre 2015

Rocher du Carton...

...et lacs de Lignin



Péage de Fréjus, 29 novembre, 5h30. Départ matinal avec Pascal, du Club Alpin Français de l'Estérel, qui a préparé cette course en montagne, qu'il m'annonce longue. Il ne croit pas si bien dire, le bougre !

Nous avons remonté la vallée du Var en voiture et nous garons celle-ci au col de Fa, commune de Castellet-lès-Sausses. Pour démarrer cette randonnée, après avoir admiré la clarté rougeoyante qui envahit progressivement les pentes, nous descendons la piste surplombant la vallée du Coulomp jusqu'au hameau d'Aurent, isolé à souhait. Les seuls véhicules à moteur pouvant y accéder sont les Quads, grâce à une étroite passerelle suspendue.

Nous remontons le ravin par un joli sentier sentant bon le buis et le genévrier. Plus haut, refusant le demi-tour après une petite erreur d'aiguillage, nous restons sur la pente et traversons deux pierriers pentus pour pouvoir redescendre au fond des gorges de Grave Plane, en face des cabanes du Prey. C'est beau et sauvage. Un chamois nous observe puis s'éloigne. C'est celui que Pascal a rencontré quelques jours auparavant. Nous traversons son domaine mais il ne semble pas effrayé, comme s'il retrouvait une connaissance. Arrivés au creux du ravin, nous nous amusons à nous photographier sur les flaques d'eau gelées, comme si elles étaient des trophées. Nous remontons ensuite en hors-sentier en direction du nord-ouest, vers les crêtes, pour une ascension d'environ 900 mètres de dénivelée. Le terrain est d'abord très herbeux et l'avancée se fait facilement à vue, bien que l'arrondi du flanc de la montagne nous empêche de voir les crêtes sommitales.

Au dessus des étendues de Cormarègne, la pause repas nous permet de contempler les nombreux chamois qui se sont regroupés sur les plateaux et autour des cabanes installées sur les plans pour brouter les herbes jaunies abandonnées par les moutons, les bergers et leurs chiens. Nous sommes abrités par une petite barre rocheuse et goûtons ces instants de grâce.

Après cela, nous progressons sur un terrain de plus en plus pierreux à partir de 2200 m pour atteindre un sommet sans nom culminant à 2524 m. Il s'agit ensuite de marcher sur une crête le plus souvent large et agréable. Un vent froid, mais pas violent pour deux sous, souffle du nord (j'apprendrai plus tard que le Mistral fut très violent dans le Var et les Bouches-du-Rhône ce jour là). De là la vue est extraordinaire. A nos pieds le plateau des lacs de Lignin est immaculé de blancheur. Un endroit que j'aime, relique de plaine glaciaire extrêmement sauvage, traversée par de nombreux cours d'eau. Une petite Laponie. Au loin, mais elle ne paraît pas si loin, la masse du mont Pelat, au nord-est, domine les montagnes qui l'environnent. Au nord les montagnes de l'Ubaye, comme toujours. Au sud-est : Mont St Honorat et Tête de Travers. Et tant d'autres sommets qui nous crient : « Ohé Ohé venez nous voir ! ».

Nous négligeons le sommet du rocher du Carton (2598 m) pour passer en travers de sa pente, juste sous lui, en direction du Grand Coyer (2693 m). A ce moment là nous devons prendre une décision. L'après-midi est bien entamé, l'astre du jour sur la pente descendante.

Nous faisons finalement l'impasse sur le sommet du Grand Coyer, but initial de la randonnée prévue par Pascal. De là où nous sommes, j'évalue à plus d'une demi-heure son ascension facile, mais à plus d'une heure trente la redescente versant ouest jusqu'à la baisse du détroit puis le retour vers les lacs de Lignin. Comme nous savons déjà que nous atteindrons la voiture de nuit, nous restons raisonnable.

Entre les cotes 2584 et 2514, nous descendons donc une pente couverte de pierres et de neige. La désescalade est délicate mais amusante (on est là pour se marrer, sinon pas la peine de venir !).
Le plateau de Lignin est atteint et traversée dans une atmosphère hivernale. Nous rigolons lorsque nos jambes s'enfoncent dans la neige. L'air est froid mais agréable, nous sommes dans l'ombre du rocher du carton à la poursuite de la ligne de démarcation entre ombre et lumière, ligne qui semble s'éloigner de plus en plus vite avec la chute du soleil. Je me sens bien dans cette fraîcheur car j'ai trouvé cette année 2015 bien chaude. Les lacs sont gelés, il me semble que la glace fait dans les 10 cm d'épaisseur. Encore un prétexte à photo et rigolade.

Nous basculons enfin pour une longue dégringolade par le ravin de Baume Frachière ou nous peinons à reconnaître le sentier sous la fine couche de neige. Les Cairns sont peu nombreux et ils semblent posés anarchiquement. Au vallon de Fouès, les derniers reflets roses disparaissent du ciel. La nuit s'installe sous la Baume du Vent, alors nous portons les lampes à nos fronts.

Comme très souvent en randonnée, la fin de parcours paraît interminable. Après avoir passé à nouveau la passerelle d'Aurent l'effort à fournir n'est pas négligeable. Çà grimpe dur ! Nous arrivons enfin à la voiture vers 19h30, emplis d'une double satisfaction : nous sommes bien arrivés et nous sommes très heureux de cette journée de montagne. Douze heures de marche, cela faisait assurément une sacré bonne journée !

Voici quelques unes de nos images :
Départ à l'aube
Vallée du Coulomp, ravin de Grave Plane, et entre les deux : le village d'Aurent surplombé par le Baume du Vent

Passerelle d'Aurent
Les cabanes du Prey, fondues dans la masse
Flaques gelées dans le ravin des Pasqueïres
Baume du vent
Ascension
Vue vers le nord depuis la crête. A droite d'autres crêtes à arpenter, entre Puy du Pas Roubinou et sommet de la Fremma
Les plans du sud du massif dont le plus vaste est le plan des Mouches
Une forme cocasse que peut prendre un Cirrocumulus lenticularis : le macaron
La crête à l'approche du Rocher du Carton
Pose entre la pointe du Rocher du Carton et le plateau du Lignin
Le Grand Coyer, cette grande masse au fond à gauche, nous attendra

La cabane du Lignin au milieu des lacs du même nom
Sur le plateau du Lignin

Les lacs sont bien gelés, je m'en assure. Mais non, rien à craindre
Fin de journée chromatique et retour dans la pénombre des gorges

1 commentaire:

  1. Les nuages lenticulaires sont parfois pris pour des OVNIs. On le comprend en voyant celui-ci.
    Une superbe balade. Vous avez fait concurrence aux chamois !

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